Aujourd’hui, nous ne donnons pas la parole à un·e auteur·rice, mais à une maison d’édition, à savoir les éditions YBY qui sont un partenaire régulier de VendrediLecture !
Dès la page d’accueil du site, on voit sous le logo d’YBY cette très belle promesse : « La diversité dans la fiction ». Présentez-nous les valeurs des éditions YBY et le choix d’un tel positionnement dans l’univers éditorial français.
Notre objectif est d’offrir à notre public l’occasion de rencontrer des personnages queers et issus de la diversité, encore trop peu présents dans la plupart des œuvres de fiction. Nos textes mettent en scène des héros·ïnes queers qui ne sont pas réduit·e·s à leur orientation sexuelle, identité de genre et/ou variation des caractéristiques sexuelles. Nous encourageons également la représentation de personnages racisés, en situation de handicap, non soumis aux stéréotypes de genre… En somme, nous valorisons l’inclusivité dans une démarche militante. Ces types de représentations nous semblent primordiaux, aujourd’hui, car ils sont encore très largement invisibilisés dans l’édition française généraliste. Avec YBY, nous espérons fournir à tous·tes des textes sans danger – safe – dans lesquels il est possible de se projeter et de se sentir représenté·e.
Vous publiez des romans, des novellas, des ouvrages collectifs ou encore des recueils. Les catégories de votre catalogue portent des noms enchanteurs : Belles œuvres, Histoires plurielles, Contes modernes, Futurs incertains, Passages imaginaires et Sombres frissons. Votre volonté de tendre vers la plus grande représentativité possible pourrait-elle vous conduire vers des genres que vous ne publiez pas encore, comme de la poésie ou de la bande dessinée ?
À l’heure actuelle, nous n’avons pas l’intention de publier des formats comme la poésie ou le théâtre, car cela demande une toute autre expertise que la fiction littéraire. Mais nous acceptons la poésie au sein d’un texte en prose ; en effet, c’est plus facile à travailler pour notre équipe éditoriale ! C’est le cas d’une de nos novellas, L’Irrequiem, dans laquelle on trouve de nombreux effets poétiques, à la fois dans l’écriture et dans la mise en pages. Plus généralement, nous devons nous restreindre quant aux formats plus ambitieux, les romans par exemple, en raison de notre statut associatif. Nous avons fait une exception pour une bande dessinée, il y a quelques années, sans avoir parfaitement conscience alors de ce que cela impliquait comme travail éditorial. Il s’agit de la traduction française du webcomic anglophone Always Raining Here, que nous allons publier prochainement. C’est un projet de longue date qui nous tient à cœur, même s’il aura pris du temps à sortir ! En somme, il s’avère que ce type d’ouvrage représente une charge trop conséquente pour une équipe bénévole comme la nôtre, malheureusement.
Sur votre site et en introduction de vos ouvrages, vous prenez soin d’avertir les lecteurs de la présence de contenus sensibles, aussi appelés trigger warning. À notre connaissance, vous êtes la seule maison d’édition française à faire cet effort. Avant tout, merci ! Et surtout, comment définissez-vous qu’un sujet peut heurter la sensibilité du lectorat ?
La mention des contenus sensibles commence doucement à émerger dans le secteur éditorial, ou en tout cas, dans des maisons d’édition engagées, comme Akata et Actu SF notamment. C’est une très bonne nouvelle, et nous espérons que cela va continuer à prendre de l’ampleur ! De notre côté, nous essayons d’être aussi exhaustif·ve·s que possible dans les contenus sensibles que nous listons. Les textes sont relus plusieurs fois à chaque étape éditoriale, et les personnes impliquées sont invitées à relever les éléments potentiellement problématiques à leurs yeux. Nous faisons également appel à des lecteur·rice·s sensibles concerné·e·s, autant que possible, au sein de l’équipe ou en dehors, et nous faisons preuve d’autant plus de vigilance avec les textes aux thèmes durs. Les contenus sensibles, chez YBY, sont aussi une source de discussion constante entre les membres de l’équipe ! Nous sommes susceptibles d’évoluer sur différentes problématiques. Par exemple, la mention dans les contenus sensibles des « relations sexuelles », même quand elles sont saines, est récente. Il a fallu nous déconstruire sur le fait que les relations sexuelles sont des injonctions, dans notre société, et que certaines personnes peuvent ne pas avoir envie de lire des histoires qui en décrivent. D’ailleurs, dans le cadre des rééditions de nos anciens ouvrages, nous faisons de nouvelles lectures sensibles, étant donné que nous continuons à nous renseigner et à nous éduquer au fil du temps ! Il nous semble important que tous nos livres puissent être lus sans risque de mauvaise surprise pour le public, autant que possible.
Nous invitons chaque semaine les internautes à partager leur #MardiConseil. Quel est le meilleur conseil de lecture que vous avez reçu et/ou donné ?
Nous gardons un très bon souvenir de la sortie de notre recueil Musique. Nous l’avions conseillé à des chroniqueur·euse·s, et un retour nous a particulièrement touché·e·s : une partenaire nous a écrit qu’elle avait été très émue d’avoir pu lire un texte sur un personnage pansexuel, comme elle, car cette représentation est quasiment inexistante en littérature – et trop rarement bien mise en scène. Recevoir ce genre de message nous prouve que notre travail a du sens. Et cela nous motive à continuer de publier des ouvrages encore plus inclusifs, en mettant en avant les identités queers les plus invisibilisées dès que nous en avons l’occasion !
Chaque début de semaine, nous posons #LaPetiteQuestionDuLundi à nos participants. La plus fameuse d’entre elles est la suivante : Avec quel personnage de la littérature voudriez-vous être coincée dans un ascenseur ? Et pourquoi ?
Toute l’équipe d’YBY serait d’accord pour se retrouver avec Goderic, un personnage du roman Une idée d’incandescence. Il ferait quelques blagues pour tenter de nous rassurer, ce qui aiderait bien en attendant que l’ascenseur soit réparé !